Lettre du Front : 16 août 1914

Notre grand-oncle Émile Charles GRASSIOT né le 25 août 1890 à Paris est mort pour la France le 17 septembre 1914 à Avocourt dans la Meuse. Il était Caporal au 31ème R.I. et faisait partie de ces nombreux “poilus” engagés dans la 1ère guerre mondiale. Pour sa mémoire et pour que nous fassions tout pour éviter que de telles atrocités ne se reproduisent, surtout en cette période de conflit entre la Russie et la Géorgie, voici la première de ses lettres du front :

16 Août 1914

Mon cher Marcel

Dire que si j’étais à Paris j’aurais peut-être quartier libre. Mais voilà je suis dans un pays qui ne ressemble que de très loin à Paris. Notre palais, en l’occurrence une grange, est le moins luxueux possible. Comme jardin des tas de fumier et la mer, c’est le purin. Victor Vaissier n’a jamais connu ça. Si l’on veut se coucher sur le foin ou la paille, on se réveille (pas moi encore heureusement) plein de poux (des poules sans dents) ou d’asticots. Quoi de plus admirable, et à part ça rien de mauvais, on se nourrit très bien et notre lieutenant, maintenant capitaine depuis 4 jours y contribue dans une très large part. Il doit rejoindre le 41ème d’Infanterie mais je crois que vu les difficultés il restera avec nous.

Sur la guerre tu es peut-être plus documenté que moi. Partout où nous passons les gens disent avoir vu les allemands, j’ai seulement aperçu ce matin le premier casque (vide de toute tête). Malgré ça il est certain que toute notre région est infestée de cavaliers allemands qui maraudent et pillent tant qu’ils peuvent. Comme ce ne sont que de petits groupes d’hommes, ça ne donne pas lieu à combats. Toutefois nos chasseurs à cheval les poursuivent avec acharnement et bien que souvent inférieurs en nombre ils leur travaillent la peau sérieusement sans cruauté inutile car le français est sûrement trop magnanime.

Mais malheur au chasseur français qui tombe entre leurs mains car le moindre supplice qu’ils lui font subir et la mort serait bien préférable, ils lui coupent un ou même les deux poignets. En dehors de ça toutes les cruautés sont de règle, rien n’est sacré pour eux, ni blessé, ni femmes ni enfants. Nous leur rendrons la pareille, sois en sûr et encore ce ne sera que la mort pure et simple trop douce pour eux. Probablement affamés ils pillent de pauvres villages, incendient et poussent les femmes et les gosses dans les flammes. Ils seront jugés, ils seront châtiés.

Mon cher Marcel je m’arrête, ma santé est très bonne. Je vous souhaite la même chose à tous. Embrasse bien ma Tante et mon Oncle pour moi et donne moi des nouvelles chaque fois que tu le pourras en excusant les peut-être grands retards qui pourront se produire de mon côté et qui ne dépendront pas de moi. Je t’embrasse de tout cœur.

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